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The Fair Play
11 mai 2009

Foucault 71 épisode 0 - Collectif 71

Critique de Foucault 71 épisode 0 de Sabrina Baldassarra par le Collectif F71 – Théâtre de l’Odéon

Foucault 71 épisode 0 met en scène le philosophe Michel Foucault, ainsi que d’autres intellectuels de la même époque, lorsqu’ils ont créé le GIP (Groupe d’Information sur les Prisons) et se sont investis dans l’affaire Jaubert et le comité Djellali. Et c’est à la manière d’un documentaire que le Collectif 71 fait revivre ces moments de l’histoire politique française d’après 68. D’un point de vue global, il s’agit d’une œuvre à la fois instructive (surtout pour ceux qui n’ont pas suivi les faits aux dates où ils se sont déroulés) et agréable par la spontanéité de ses dialogues, refusant un aspect trop austère qui découlerait du sérieux du domaine abordé. On y admire la pertinence des thèmes, en rapport avec les mouvements militants assez nombreux et visibles dans l’actualité, ainsi que la richesse des sources exploitées et la variété de leur mise en scène (comme la figuration par les comédiennes d’une photo de l’époque représentant leurs personnages, d’une émission de radio ou encore d’une conférence de presse mettant le public dans la position du parterre de journalistes). L’aboutissement de ces moyens est un spectacle dense et néanmoins synthétique, malgré quelques coupures mal venues ( pendant des passages de lecture ou de déplacement du public finalement peu utile). Mais bien que les personnages évoqués soient majorité des hommes, les comédiennes passent d’un rôle à l’autre avec facilité, et sont d’autant plus crédibles qu’elles ont pris le parti de ne pas pousser jusqu’au bout l’imitation. On reconnaît Foucault, Mauriac et les autres, sans être gêné par la caricature mal aisée d’une voix masculine et de gestes faussement virils. Un certain humour se dégage même au milieu de ce tableau inquiétant de la répression et de la vie en milieu carcéral, mais pas un comique bouffon, juste une vision attachante de figures d’intellectuels du panthéon de la presse et de la politique rendus très humains.

            Seulement cette réactualisation historique pèche par des défauts inhérents au genre auquel elle se rattache. Le GIP, à l’époque où il a été fondé (ainsi que les deux autres groupes de militantisme et d’information) étaient des instruments de résistance, de dénonciation, et des moyens de parole donnés à des témoins gênants et oubliés des autres media. Or il manque ici la force d’une telle entreprise, car même si l’écho avec le problème des prisons tel qu’il se pose aujourd’hui est suggéré, il n’est pas effectivement cité, analysé, dénoncé, ou encore symbolisé lui-même. Et de fait, la pièce manque de résonance avec l’actualité, et ne justifie donc pas le choix d’une adaptation théâtrale plutôt qu’un documentaire vidéo ou audio. En effet, si ce n’est par la sympathie qu’elle dégage et par l’intérêt pour des questions qui sont encore à poser et des formes de réflexion encore à produire, la forme scénique ne présente pas d’intérêt spécifique et perd même en authenticité en comparaison avec les documents originaux. Le théâtre est une forme d’art qui offre l’opportunité particulière de faire un lien toujours renouvelable avec avec les faits immédiats du contexte politique, chance qui n’est pas saisie dans l’argumentation de cette œuvre. Foucault 71 épisode 0 est donc une création qui invite à une discussion mais n’ouvre pas elle-même le dialogue attendu. Elle produit un objet de réflexion éloquent mais dans lequel il manque simplement un lien entre l’histoire que l’on fait parler et l’atcualité qui la remotive.

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